« 7 priorités pour une politique féministe », note pour le G7 (2018)

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Voici quelques points d’attention sur lesquels des ONG françaises, membres de la
Plateforme Genre et développement (1), souhaitent insister dans le domaine de l’égalité femmes-hommes à l’international.

Nous saluons l’orientation « féministe » de la diplomatie et de la politique étrangère (comme de la politique nationale) revendiquée actuellement par la France. Pour l’étendre à l’ensemble des pays du G7, la rendre effective et en assurer la redevabilité, nous préconisons sept priorités :

  1. Allouer au moins 85% de l’aide publique au développement à l’égalité de genre de manière dédiée ou transversale (2) et renforcer les mécanismes de marquages budgétaires genre et d’évaluation de toutes les politiques et programmes (ce qui devrait se traduire par un débat annuel au Parlement permettant d’améliorer la transparence et d’impliquer les élu-es). Les dernières données de l’OECD montrent en effet que de nombreux pays de l’OCDE, y compris du G7, sont loin d’avoir mis en place tous les mécanismes de traçabilité (3).
  2. Réaffirmer les droits des femmes, notamment les Droits sexuels et reproductifs (dont le droit à l’avortement sûr et légal constitue une base) face aux risques de reculs actuels que sont les conservatismes et les restrictions budgétaires.
  3. Rendre l’égalité femmes-hommes transversale à l’ensemble des thèmes abordés par le G7, par exemple : les thèmes « croissance inclusive » et « climat environnement ». Le genre doit en effet être intégré dans la transition écologique (dans tous les financements et politiques climatiques (4) et dans la mise en oeuvre des 17 ODD). Ainsi selon l’OIT des mesures sont nécessaires pour restreindre la ségrégation professionnelle dans les branches d’activité de la transition énergétique comme dans le numérique (5). Et les femmes ne doivent pas rester cantonnées au « micro » dans la sphère agricole, alimentaire, de l’économie sociale et solidaire, notamment les femmes migrantes.
  4. Engager tous les pays du G7 à soutenir la Convention internationale contre les violences et le harcèlement au travail, un phénomène à ampleur massive, afin d’en assurer l’adoption par l’Organisation internationale du Travail en juin 2019.
  5. Garantir la participation effective et paritaire des femmes à la vie publique en général, en particulier aux Accords de paix et aux programmes de reconstruction des Etats, de leur gouvernance démocratique et de la justice. Chaque État du G7 devrait s’engager à développer et financer son Plan d’action national sur les femmes, la paix et la sécurité d’ici 2020. L’Alliance Sahel et les accords de développement et de coopération avec les pays fragiles doivent intégrer des clauses précises sur l’égalité femmes-hommes. Les défenseurs et défenseuses des droits doivent être protégés, sachant que les défenseuses sont plus exposées aux violences sexuelles. La France doit s’exprimer contre l’impunité dans le domaine des violences sexuelles, de la répression face aux luttes contre l’accaparement des terres et des ressources naturelles.
  6. Prendre la question de l’égalité très en amont, en la reliant aux droits de l’enfant et à une éducation non sexiste en France, dans les pays du G7 et dans les pays de coopération, en faisant le lien avec d’autres formes de discriminations (6). Encore 62% des enfants non scolarisés dans le monde sont des filles (160 millions de filles) et les filles en situation de crise ont 2,5 fois moins de chance d’être scolarisées que les garçons. Un soutien de la France, dans le cadre de la déclaration du G7 canadien, à l’éducation des filles en situation de crise, constituerait un formidable levier pour accroître l’accès aux services sociaux de base tels que l’hygiène, la nutrition, et la santé sexuelle et reproductive. L’accès à l’éducation constitue également un rempart contre le mariage d’enfant et de nombreuses autres formes de violence dont les filles sont victimes en situation de crise. Une éducation de qualité, transformatrice en genre, peut aussi permettre de promouvoir, dans et en dehors de l’école, une société plus égalitaire.
  7. Rattraper le retard français (et dans la sphère francophone en général notamment dans les pays du Sud) sur l’expertise genre (formulation et évaluation des politiques axées sur les résultats intégrant le genre, études des contextes, budgétisation sensible au genre) et les moyens humains et matériels qui leur sont alloués. Il faut renforcer le soutien à la recherche-action et aux associations féministes. Il faut des politiques et des projets de recherche sur le genre, y compris masculinités et la participation des hommes et des garçons à l’égalité. L’égalité femmes-hommes doit constituer un axe central du G7 en France en 2019 avec un soutien des initiatives prises par le Canada, (notamment la poursuite du conseil consultatif sur l’égalité des sexes, l’organisation du W7) et un suivi effectif des engagements politiques et financiers qui seront pris par les membres du G7. Sur cette base, il faudra aller plus loin en proposant un véritable « Pacte » sur le genre, notamment pour des financements spécifiques et transversaux. Dans ce processus, la consultation, la concertation et la participation des associations féministes, de femmes et des jeunes filles doit être soutenue et ce dès les réunions préparatoires.

Associations ayant participé à ce texte :
Adéquations • CARE France • Coalition Education • Equilibres & Populations
• Genre en Action • ONE • Plan International France • Planning Familial • Quartiers du
Monde • WECF France

(1) Instance de concertation sur les enjeux d’égalité femmes-hommes à l’international ; coordination@genre-developement.org ; http://www.genre-developpement.org ;
(2) Objectif fixé par le Plan d’action genre de la Commission européenne ; indicateur 5C1 des Objectifs de développement durable sur le financement de l’égalité
(3) http://www.oecd.org/fr/cad/femmes-developpement/Aide-egalite-homme-femme-2017.pdf
(4) Sur les finances climat et les femmes, un texte de plaidoyer avec des propositions a été signé par plus de cinquante organisations de la société civile au niveau français et international à l’occasion du One Planet Summit : http://www.genredeveloppement.org/travaux-de-la-plateforme/avis-et-recommandations/plaidoyer/
(5) Rapport de l’OIT « Emploi et questions sociales dans le monde 2018 – Une économie verte et créatrice d’emploi » http://www.ilo.org/global/research/global-reports/weso/greening-with-jobs/WCMS_628709/lang–fr/index.htm ; « L’atténuation des changements climatiques pourrait faire baisser légèrement la part des femmes dans l’emploi total, car les gains d’emploi associés au scénario à 2 °C se trouvent dans les branches d’activité actuellement dominées par les hommes (énergies renouvelables, fabrication et construction), à moins que des mesures ne soient prises pour restreindre la ségrégation professionnelle ».
(6) D’origine sociale, ethnique, d’âge, d’orientation sexuelle, de handicap, etc. (approche intersectionnelle)
(7) Cette liste et ces propositions pourront être complétées ultérieurement dans le cadre des travaux de Plateforme Genre et développement, notamment en vue du G7 présidé par la France en 2019

Télécharger « 7 priorités pour une politique féministe » – Note pour le G7, par la Plateforme Genre et Développement (2018)